A la veille de la fête de Pâques, regardons l’épreuve par ses effets !

Publication : dimanche 12 avril 2020

herbeumont 2018 02Cela fait déjà 25 jours que nous vivons en "tortues" confinées (la "tortue" est le symbole du club de jogging duquel je fais partie. Cet article est inspiré par la vie du club en "confinement"). Si rien ne parvient à infléchir en nous le désir de relations sociales, de partage de beaux moments de jogging, de salle de sport, d’amitié, cela veut dire que nos restons des tortues résolument humaines, résistant à laisser que leur humanité soit détruite par un virus. Dans notre quotidien, la solidarité qui s’organise autour de nous, la créativité qui permet de trouver une et mille façon de surmonter l’isolement, témoignent, s’il le fallait, que l’homme est bien plus qu’une machine et qu’il peut se réinventer continuellement. C’est un constat merveilleux à l’heure où certains rêves transhumanistes laissent croire que l’espérance de l’humanité réside dans la « création » d’un « homme augmenté » par la technologie.

Ceci dit, autour de nous, le virus continue a semer la mort et le mal : par seulement le mal du confinement, mais aussi celui de la fermeture des écoles, de l’économie en déroute, de la récession qui menace la survie de la société en plongeant les travailleurs, les entrepreneurs, les commerçants dans le gouffre. Et pire encore, nous apercevons que le corps médical se bat contre un méchant virus avec des moyens souvent inadéquats, et que dans les maisons de repos nos pères, mères, grand-pères et grand-mères meurent dans de grandes souffrances et une solitude effrayante. C’est cela le mal : une injustice et un mystère à la fois, un scandale surtout !

Quand on se positionne derrière le mal, à la recherche de ses causes, mille et une explications ne suffisent pas à en venir à bout. Le mystère s’agrandit et, pire, les accusations fusent sans pour autant nous apporter aucune réponse ni aucune solution. Le mal reste un scandale, une injustice et c’est tout. Quand on se positionne devant lui, à la recherche de ses effets, on peut par contre entrevoir une lueur d’espoir. Car on voit de personnes prêtes à témoigner d’une grande compassion pour soulager ce mal, prêtes au don d’elles-mêmes pour éviter que la souffrance et la destruction ne submergent ses semblables (le plus souvent inconnus), prêtes à se mettre totalement en jeu afin que la solidarité, la paix, la bienveillance triomphent de la peur, de l’angoisse, de la solitude, de la fermeture sur soi. Il suffit d’ouvrir les yeux pour les voir. Ce qui était inimaginable il y a quelque temps en terme de solidarité et d’unité entre les gens le devient soudainement. Voici le mal vu par ses effets.

Cela fait réfléchir en cette veille de la fête de Pâques. Pour les chrétiens, ces jours sont en effet des jours saints. Pour la première fois de l’histoire, les chrétiens sont obligés à vivre ces jours dans la solitude de leur confinement. Alors, comme tous les autres confinés, ils sont appelés plus que jamais à regarder le mal – la mort du Christ - plus par ses effets que par ces causes. Et les effets les voici: par le don de soi, le Crucifié injustement condamné à une mort dans la solitude, dans la douleur et dans l’humiliation, transfigure la souffrance qu’il endure, lui donnant un sens, une direction, une issue. Le Crucifié devient ainsi à jamais le symbole de celui qui, ne renonçant pas à se battre dans l’épreuve, l’assume en se faisant proche de tous ceux qui, comme lui, doivent la traverser. La lumière de Pâques jaillit alors de cette expérience qui n’élimine pas le mal, mais le transfigure. C’est celle-là la victoire sur la mort.

DSC 0125 cerouxAu fond, si l’on veut prendre les choses plus en douceur, cette expérience de prendre le mal par ses effets, nous pouvons la faire aussi dans notre quotidien de tortues habituées à nous entraîner sérieusement pour atteindre un but. Combien de fois, au cœur de notre entraînement ou de notre épreuve, nous doutons de nous, en nous représentant la souffrance requise pour atteindre le but comme dépourvue de sens ? En ce moments, ce n’est pas en allant chercher les causes de celle-ci (par exemple en se disant que c’est la faute à un mauvais entraînement) que nous arrivons à surmonter la difficulté, mais en regardant plutôt vers les effets, vers ce que nous voulons atteindre. Et très souvent, en regardant aux effets, nous découvrons que nous ne sommes pas seuls à traverser l’épreuve et, dissipant les nuages du doute, une certaine lumière se fait en nous qui permet d’avancer jusqu’à la ligne d’arrivée. Par la force du mental, en revenant vers notre iniériorité qui permet de nous fixer sur le but et détourne des causes du mal, la joie peut éclater alors en nous.

Chanceux sommes nous à qui la pandémie permet de découvrir où se niche réellement la richesse de nos vies.

Bonne fête de Pâques à tous !